Header image ANTOINE TUDAL  
 
 

Si j'étais un espion

Après son premier film, " Hitler, connais pas " qui avait eu un certain retentissement, Bertrand Blier m'avait contacté.

En fait, il s'agissait là plus d'un modèle de ce qui allait devenir la forme des bonnes émissions de télévision que de vrai cinéma. Mais le fait est qu'on parlait de lui et de la possibilité de donner une suite à sa nouvelle notoriété. Il cherchait un sujet et son producteur André Michelin était prêt à le suivre.

Je leur fit découvrir " L'Ecume des jours " de Boris Vian, un ami trop vite disparu mais dont le livre tiré originellement à huit cents exemplaires venait de paraître dans la collection 10x18. Il commençait à troubler fortement les jeunes gens qui s'en ouvraient l'esprit.

Ce fut un emballement immédiat. Nous étions tous les trois persuadés que l'on tenait un des plus beaux sujets qui se puisse tourner, tant la poésie des images et le charme des scènes mouvementées et insolites étaient touchants.

Notre vision de ce petit récit passerait par un univers d'effets spéciaux consacrés à la fantaisie créatrice de l'un des grands auteurs du XXe siècle.

Nous nous mîmes au travail avec un enthousiame d'autant plus grand que venaient d'apparaître deux jeunes acteurs pleins de promesses qui portaient en eux tout le charme et la fougue des principaux personnages : Colin et Chick. Il s'agissait de Jean-Paul Belmondo ( déjà acteur principal des "Copains du dimanche" et que "A bout de souffle" venait de propulser au premier plan ) et Jean-Claude Brialy. Pour le professeur Mangemanche, nous voulions Jean Marais. Pour le cuisinier Nicolas, Michel Simon s'imposait.

Evidemment, cette aventure ne pouvait être financée par un budget uniquement français. Nous rêvions d'une co-production franco-américaine. Las, le scénario terminé et proposé aux producteurs américains révéla une tare culturelle de taille : les Américains étaient totalement imperméables à Boris Vian !

Le projet fut abandonné la mort dans l'âme. Il fut réadapté quelques années plus tard, à la française, en noir et blanc, avec une distribution qui ne lui porta pas chance.

Nous nous remîmes au travail sur un sujet original que j'avais proposé. Bertrand Blier lui donna un ton plus réaliste en le recadrant dans une histoire d'espionnage assez trouble, jouant sur des atmosphères inquiétantes. Ce n'était pas encore du grand Blier, mais il s'entraînait à devenir celui qui réaliserait " Notre Histoire ".

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